SPECIALE 56ma BIENNALE DI VENEZIA
Les Polonais de Venise
di Barbara Polla & Paul Ardenne

Trois artistes polonais, Joanna Malinowska & C.T. Jasper, et Filip Markiewicz, ont investi respectivement pour les deux premiers, le Pavillon polonais, aux Giardini, et, pour le troisième, le Pavillon luxembourgeois, à Ca’ del Duca (Markiewicz est d’origine polonaise mais de nationalité luxembourgeoise).

Ces trois artistes et ces deux pavillons s’interrogent de manière très diverse mais parallèle sur la question, cruciale en ce moment de notre histoire et centrale à cette Biennale de Venise, de l’identité nationale, transnationale et multinationale.

Les deux pavillons présentent chacun un film ; dans les deux pavillons, le film est projeté grâce à trois projecteurs ; dans les deux films, la question de l’identité est au premier plan. Le film de Filip Markiewicz est même intitulé : Voyage au bout d’une identité.

Les similitudes se multiplient et les deux films développent mieux que bien des œuvres pourtant sélectionnées pour en parler, la question de l’identité, de ses origines, de ses avenirs aussi multiples qu’elles-mêmes.

Pour souligner l’aspect multiculturel du travail de ces artistes comme celui de Roots & Routes, ce papier est publié en français, la langue des auteurs, en anglais et en italien.

Polish Pavilion at 56th International Art Exhibition, La Biennale di Venezia, 2015

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1) Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W

Quand l’Histoire devient histoire

Pour Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W, Joanna Malinowska & C.T. Jasper ont tout d’abord réalisé une incroyable recherche identitaire : une recherche qui, comme il se doit pour toute recherche, pose des questions, sans forcément apporter de réponse. Une exploration qui commence par celle de l’Histoire, une histoire ignorée de la plupart des polonais : celle de Haïti et de Napoléon. Si les Polonais d’aujourd’hui savent qu’ils doivent à Napoléon Bonaparte leur existence sur la carte de géographie de l’Europe, peu d’entre eux en revanche savent comment la Pologne a remercié Napoléon de cette formalisation de leur existence.
Haïti en pleine rébellion ? Napoléon envoie des soldats polonais pour mâter la révolte. Et le bataillon polonais de prendre la voie vers l’île lointaine, prêt à défendre l’honneur de Napoléon. Mais une fois sur place, voici que les survivants de la fièvre jaune changent de camp : les Polonais ne sont-ils pas depuis toujours en lutte pour leur propre indépendance ? Comment pourraient-ils, dans ce ces, combattre l’indépendance de Haïti ? Il ne reste bientôtt qu’une centaine de polonais, semble-t-il, mais ceux-là firent tant et si bien que lorsque Haïti rédigea sa constitution d’indépendance, le 20 mai 1805, les Polonais y trouvèrent une place et des privilèges tous particuliers, dont la nationalité haïtienne1, jusqu’à être nommés, raconte-t-on parfois, « honorary blacks ».

Qu’est-ce que l’identité d’un peuple ? Comment se décline-t-elle aujourd’hui ? Comment, en tant qu’artistes, se sont demandés Joanna Malinowska & C.T. Jasper, pourrions-nous revisiter cette extraordinaire histoire montrant la supériorité d’une vision du monde basée sur un indéfectible amour de l’indépendance de chacun, sur un ordre du monde dicté par les puissants ? Comment raconter aujourd’hui, à l’ère de la globalisation, cette improbable alliance, paradigmatique de ce que pourraient être nos lendemains, entre Polonais et Haïtiens ?

Joanna Malinowska et C.T. Jasper, pour ce faire, se sont tournés vers ce que la culture polonaise a de plus classique – son opéra national – et ce qui est aussi un point d’orgue du travail de Joanna Malinowska : la musique. N’a-t-elle pas, au fil du temps, conçu ses performances et ses vidéos les plus belles autour de la musique, de Glenn Gould à Piotr Anderszewski, de John Cage à Masami Tomihisa, de Beethoven (Man in the State of Nature, 2010) à Messiaen (Three gazes out of twenty, 2008) ?

La musique, donc. Halka. Halka ? L’héroïne de la première grande œuvre lyrique éponyme de Stanislaw Moniuszko, qui rencontre dès 1858 un immense succès et devient l’opéra favori des polonais. Un livret souvent considéré comme pauvre, notamment parce que celle qui deviendra l’héroïne nationale polonaise ne réalise aucune action glorieuse ni même patriotique ; elle représente même, d’une certaine manière, l’antithèse de l’héroïne nationale, tout en personnifiant l’injustice pathétique de la souveraineté des classes dominantes en regard du quotidien de chacun de nous.

Prête à tout donner pour obtenir l’amour tant espéré de Janusz, père de son enfant mais sur le point d’épouser la fille d’un notable, la modeste Halka tente d’abord de se venger en mettant le feu à l’église de la cérémonie, puis se ravise et se jette dans la rivière sous les yeux de celui qui l’aime, éteignant dans l’eau une flamme trop brûlante. À la fois modeste par sa vie et fantastique par son destin, « Halka évoque les légendaires roussalki, ces êtres fantastiques de la mythologie slave qui, en hiver, se retirent dans leur palais de glace au plus profond des eaux douces et, sous le couvert d’un réalisme social ébouillanté par le “Printemps des Peuples“, devient le porte-drapeau de l’“Insurrection polonaise“ »2. (Mélanie Defize)

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Mise en scène et localisation

Pour ceux qui comme les auteurs de cet article ne seraient encore jamais allés en Haïti, c’est chose faite après avoir passé une heure dans le pavillon polonais. En effet, dans la vaste salle, la multiple projection ne nous offre pas un film, mais une réalité. On ne regarde pas à travers une caméra, on est sur la place, à Casale, avec les spectateurs haïtiens, sans distance. On sent la poussière soulevée par les motos qui passent, au milieu de la place où Halka est chanté en plein air par les chanteurs du philarmonique de Varsovie, en costumes. On a chaud avec eux. On est là, dans cet ailleurs, avec les spectateurs. On sent l’odeur de l’eau et de la poussière mélangées, quand l’eau versée cherche à effacer la poussière. On caresse la chèvre de la main, presque. À la sortie, on se dit qu’il va falloir reprendre l’avion pour rentrer. Mais de où ? De Haïti, de Varsovie ou de New York – et pour aller où ? À Venise ? La réponse est dans le titre : 18°48’05”N 72°23’01”W. Sortez les boussoles. La localisation scientifique, une habitude préalable dans l’œuvre de Malinowska, remplace une localisation nationale. On est quelque part – à Halka/Haiti – mais on n’est plus « de » quelque part. On est dans la fusion. Les frontières ont disparu, il ne reste que des latitudes et des longitudes. Le monde, en somme.

Par l’intermédiaire des liens entre la Pologne et Haiti, C.T. Jasper & Malinowska questionnent d’une manière plus générale les liens entre les nations opprimées, rebelles, acquérant au prix fort leur indépendance, ainsi que la question de la rencontre d’identités différentes, et de l’apport que de telles rencontres, sociologiques ou artistiques, à la compréhension, l’ouverture, l’intégration, voire la paix dans le monde.

C.T. Jasper & Joanna Malinowska
Halka/Haiti. 18°48’05”N 72°23’01”W
multichannel projection panoramic video installation with sound, 82 minutes, 16x3x0,5m / 52×9,8×1 ft,

Polish Pavilion at 56th International Art Exhibition, La Biennale di Venezia, 2015

2) Voyage au bout d’une identité

« Imagine le corps humain n’appartenant à aucune religion particulière ».
« Imagine le corps humain ne se sentant pas supérieur à la nature ».
« Imagine une culture où toute la création artistique
procurerait à tous les corps humains
des interrogations philosophiques susceptibles
d’améliorer la vie en société ».

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le Luxembourg sans oser le demander ou faute d’avoir pris le temps de vous informer ? Entrez visiteurs, passants et curieux ! Le Paradis de Markiewicz est ouvert, Paradiso Lussemburgo vous dit tout : l’exposition de Filip Markiewicz emplit à ras bord le Ca’ del Duca, le palais où le Grand-Duché a établi son pavillon en terre vénète. Un Grand-Duché qui n’a pas hésité à sélectionner, pour le représenter, un fils d’immigrés polonais, qui va faire de son « paradis » une œuvre « d’art total », un authentiqueGesamtkunstwerk, dans la grande tradition wagnérienne de la création à spectre élargi et faisant flèche de tout bois. La morphologie hypertrophiée de cette création hors norme s’organise autour d’une salle centrale, petite, beaucoup plus petite que le pavillon polonais – comme si s’établissait une échelle dimensionnelle involontaire entre le Luxembourg et la Pologne, entre l’Europe et une région transatlantique, entre le paradis, si petit, et le vaste monde. Comme le dit Filip Markiewicz lui-même, « La pièce centrale du Paradiso est le filmVoyage au bout d’une identité. C’est une sorte de road movie, interprété par Leila Schaus et Luc Schiltz, qui part de Luxembourg pour aller en Pologne, le pays d’origine de mes parents, et retour. Ils sont des sortes d’alter ego, me représentant, disant mes mots, mais me permettent une distance par rapport à l’autoportrait ou l’autofiction. On peut aussi les considérer comme des Adam et Ève égarés dans un nouveau paradis. » Le film commence à Varsovie, dans le Polonia Palace Hôtel, sorte de « monument stalinien, » en face du Palais de la Culture, « architecture même de l’échec du pouvoir », selon Markiewicz. Et le dialogue qui s’instaure entre ses « alter ego » de dans la salle de bains de l’hôtel devient un concentré de l’histoire de l’Europe. Plus tard (même si les différentes séquences du film peuvent se regarder selon le tempo du spectateur), la séquence qui se déroule à la frontière allemande, le long de la Moselle, dans les vignes luxembourgeoise à Remich, est riche de sens : Leila lit un extrait de Par delà le Bien et le Mal de Nietzsche alors que Luc est par terre, dans un moment quasi mythologique. L’identité, au-delà du bien et du mal ? L’identité européenne flottante personnifiée tant par l’artiste que par son œuvre, protection ultime contre les identités nationales toujours menaçantes ? Le film de Filip Markiewicz, allégorie versatile aux références multiples au cinéma « européen », mais aussi à Tarantino, David Lynch, Batman,… avec ses citations, ses tours et détours urbains, ses amitiés, amours et philosophies, ses nostalgies d’un paradis toujours attendu, pose la question puissamment actuelle de la mutation des identités nationales au sein de l’Europe. Le refus de l’artificiel, le refus du style pour le style, caractéristiques de l’artiste, et sa signature, acquièrent ici la valeur de programme. Et ce, au nom d’une Nécessité avec un grand « N », superlative, que l’on va dire tout à la fois thérapeutique et éthique.

Filip Markiewicz rend compte de la réalité européenne sur un mode à la fois critique, politique et fantasmatique mais sans s’illusionner sur la barbarie frontale ou insidieuse qui la caractérise. Il nous entretient d’un monde vécu qui n’a rien d’idyllique, que signalent ses séductions douteuses autant que son irrégularité, son imperfection, son hypocrisie, sa violence, son manque d’équité, son goût irrépressible des combinaisons tordues. Créer en le rappelant, créer de le rappeler, en élisant l’artiste témoin, c’est opérer comme révélateur, comme dénonciateur, comme guérisseur. C’est avancer le principe d’une possible thérapie, d’une amélioration souhaitable, d’un amendement. La disposition éthique de l’œuvre de Filip Markiewicz, immédiatement comme sub specie aeternitatis, réside dans cette inflexion à ne jamais lâcher la proie pour l’ombre, à ne pas laisser le spectateur en repos, pour cette raison d’abord : le premier spectateur de l’œuvre, c’est, ici, l’artiste en personne, tout à la fois baladin du monde européen, enquêteur et archiviste d’une mentalité d’époque et de ses contradictions.

Journey to the End of an Identity, 2015
directed by Filip Markiewicz
Full HD film installation synchronized on 3 x projectors

Format 2.35 :1,35 minutes, variable dimensions

3) De l’identité personnelle à celle de l’art

Filip Markiewicz est donc luxembourgeois, d’origine polonaise, il vit en Allemagne, plongé dans l’actualité politico-médiatique. Et « le bout de l’identité », pour Markiewicz, n’est nulle autre que l’Union européenne, cette union puissante et fragile, cette alliance des cultures de la France et de l’Allemagne, de l’est et de l’ouest, de l’enfer des ghettos polonais et de tous les paradis luxembourgeois.

Joanna Malinowska, quant à elle, vit à New York et porte en elle la passion anthropologique de son homonyme qui n’est pourtant pas de sa famille, Bronislaw Malinoswki. Depuis toujours elle se passionne pour le cultures de l’ailleurs – elle se dit même « anthropologue culturelle » – et pour la musique. Son film met en scène la musique polonaise dans un ailleurs aussi historique qu’improbable.

Mais le plus intéressant des trois, en termes de travail identitaire, est indubitablement C.T. Jasper. Un nom qu’il s’est choisi, une identité construite, un nom, Jasper, qui est le plus souvent utilisé comme prénom. L’on ne peut s’empêcher de penser immédiatement à Jasper Johns, qui a contribué au célèbre travail de Rauschenberg, l’effacement d’un dessin de Willem de Kooning3. Ceci d’autant plus que l’on sait qu’en 2013, C.T. Jasper crée le film «Erased ». Il fusionne pour ce faire deux chefs d’œuvres du cinéma, Blue Velvet de David Lynch et Le Tambourde Volker Schlöndorff et en « efface » tous les personnages, le reste des films demeurant intouché. L’histoire se déroule alors en présence des objets, des sons et des lumières, des portes qui s’ouvrent et se ferment, mais sans personnages. Le personnage est devenu un spectateur. Est-ce là ce que souhaite C.T. Jasper ? Il nous emmène en tous cas dans une étonnante exploration artistique du potentiel narratif des « choses » et des architectures, en notre propre absence.

Revenons au nom de Jasper. Si ce n’est Jasper Johns, le seul patronyme Jasper reconnu semble alors être celui de H. H. Jasper, un neurobiologiste canadien décédé en 1999. En revanche, huit comtés des Etats-Unis et douze villes, de l’Alabama à l’Arkansas, du Tennessee au Missouri, portent en revanche le nom de « Jasper », alors qu’en en informatique, discipline chère à l’artiste, jasper est un compilateur/moteur et un produit collaboratif… Collaboratif : comme C.T. Jasper et Joanna Malinowska.

Quoiqu’il en soit, la violence sans nom du rejet de son nom, de son identité, pour s’en forger une nouvelle, hors de l’Histoire et sans histoire autre que la sienne propre, une identité qui lui permet d’exister – ou d’inexister – identiquement à Varsovie ou en Haïti, à New York ou Oulan-Bator (où C.T. Jasper semblerait résider quand il n’est pas à New York4), d’être lui, comme il le veut, dans une culture globale et villageoise, partenaire de Malinowska ou HNI – humain non identifié – étiqueté uniquement par sa position sur terre, latitude et longitude, what else. L’indépendance et la singularité polonaises, jusqu’au bout de nulle part.

Ou quand le fait de n’être plus « personne » (to be nobody, capable de changer de nom et d’identité) vous permet de créer une nouvelle identité et d’être désormais everybody.

Finalement, l’esthétique respective des deux film, très différente de l’un à l’autre mais essentielle dans les deux cas à l’appréhension de l’œuvre par les spectateurs, révèle d’un côté, dans le pavillon polonais, la poésie interrogative, parfois aux limites du baroque, de C.T. Jasper & Malinowska, et de l’autre, les anxiétés profondes de Markiewicz et la peur panique du vide que pourrait laisser la perte identitaire, compensée vaillamment par une surcharge de références, d’objets, de « choses », d’extraordinaires dessins et d’animations multiples du pavillon luxembourgeois. Les Polonais à l’œuvre à Venise nous laissent admiratifs, perplexes, enchantés et pantois devant ces possibles « Somewhere in the world’s futures ».

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1 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/94989/Lheritage-polonais-dHaiti ; https://www.youtube.com/watch?v=UwCh4kbAf5g
2 Mélanie Defize, http://www.forumopera.com/actu/connaissez-vous-halka
3 https://en.wikipedia.org/wiki/Erased_de_Kooning_Drawing
4 https://tyler.temple.edu/blog/ct-jasper-aka-professor-christian-tomaszewski-collaborator-joanna-malinowska-have-been-selected

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Versione italiana

I Polacchi a Venezia

*Traduzione italiana: Chiara Bertini

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Tre artisti polacchi, Joanna Malinowska & C.T. Jasper, e Filip Markiewicz, hanno investito rispettivamente, per quanto riguarda i primi due, il Padiglione polacco ai Giardini, e il terzo, il Padiglione del Lussemburgo, à Ca’ del Duca (Markiewicz è di origine polacca ma di nazionalità lussemburghese).

Questi tre artisti e questi due padiglioni s’interrogano in maniera molto diversa ma in parallelo sulla questione, cruciale in questo momento della nostra storia e centrale in questa Biennale di Venezia, dell’identità nazionale, transnazionale e multinazionale.

I due padiglioni presentano entrambi un film; nei due padiglioni, il film è proiettato grazie a tre proiettori; nei due film, la questione dell’identità è in primo piano. Il film di Filip Markiewicz è addirittura intitolato: Viaggio verso i limiti di un’identità.

Le similitudini si moltiplicano e i due film sviluppano meglio delle opere selezionate per parlarne, la questione dell’identità, delle sue origini, dei suoi futuri altrettanto molteplici.

Per sottolineare l’aspetto multiculturale del lavoro di questi artisti come quello di Roots & Routes, questo documento è pubblicato in francese, la lingua degli autori, ma anche in inglese e in italiano.

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1) Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W

Quando la Storia diventa storia

Per Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W, Joanna Malinowska & C.T. Jasper hanno inizialmente realizzato un’incredibile ricerca identitaria : una ricerca che, come avviene per tutte le ricerche, pone delle domande, senza apportare forzatamente delle riposte. Un’esplorazione che comincia dalla Storia, una storia ignorata dalla maggior parte dei polacchi: quella di Haiti e di Napoleone. Se i Polacchi di oggi sapessero cosa devono a Napoleone Bonaparte, la loro esistenza sulla carta geografica dell’Europa, pochi tra loro, in effetti, sono a conoscenza di come la Polonia ha ringraziato Napoleone della formalizzazione della loro esistenza.

Haiti in piena rivolta? Napoleone invia dei soldati polacchi per domare la rivolta. E il battaglione polacco prende la strada per l’isola lontana, pronto a difendere l’onore di Napoleone. Ma una volta sul posto, ecco che i superstiti della febbre gialla cambiano campo: i Polacchi non sono stati forse sempre in lotta per la propria indipendenza? Come potrebbero in questo caso, combattere contro l’indipendenza di Haiti? Sembra che ne restassero un centinaio di polacchi ma furono talmente tanti e valorosi che mentre Haiti redigeva la sua costituzione d’indipendenza, il 20 maggio 1805, i polacchi ne ricavarono un loro spazio e dei privilegi del tutto particolari, tra cui la nazionalità haitiana1, fino ad essere nominati, si racconta a volte, “honorary back”.

Cos’é l’identità di un popolo? Come si declina oggi? Come, in quanto artisti, si sono domandati Joanna Malinowska & C.T. Jasper, possiamo rivisitare questa straordinaria storia che mostra la superiorità di una visione del mondo basata sull’indefettibile amore dell’indipendenza di ciascuno, su un ordine del mondo dettato dalle potenze? Come raccontare oggi, nell’era della globalizzazione, questa improbabile alleanza, paradigmatica di quel che potrebbero essere i nostri dopodomani, tra Polacchi e Haitiani?

Joanna Malinowska e C.T. Jasper, per questo, si sono rivolti a ciò che la cultura polacca ha di più classico – la sua opera nazionale, – questo è anche un punto culminante del lavoro di Joanna Malinowska: la musica. Non ha forse, nel tempo, sviluppato le sue performance e i suoi migliori video attorno alla musica, da Glenn Gould a Piotr Anderszewski, da John Cage a Masami Tomihisa, da Beethoven (Man in the State of Nature, 2010) a Messiaen (Three gazes out of twenty, 2008)?

La Musica, dunque. Halka. Halka? L’eroina dell’omonima prima grande opera lirica di Stanislaw Moniuszko, che ricevette un grande successo dal 1858 e divenne l’opera favorita dai polacchi. Un libretto spesso considerato povero, in parte perché quella che diventerà l’eroina nazionale polacca non compie nessuna azione gloriosa e neanche patriottica; lei rappresenta addirittura, in un certo senso, l’antitesi dell’eroina nazionale, personificando l’ingiustizia patetica della sovranità delle classi dominanti in rapporto al quotidiano di ciascuno di noi.

Pronta a dare tutto per ottenere l’amore così sperato di Janusz, padre di suo figlio ma in procinto di sposare la figlia di un notabile, la modesta Halka prima tenta di vendicarsi appiccando il fuoco alla chiesa della cerimonia, poi cambia idea e si getta nel fiume davanti agli occhi di colui che la ama, spegnendo nell’acqua una fiamma troppo bollente. Nello stesso tempo ha una vita modesta e fantastica per il suo destino “Halkaevoca i leggendari roussalki, questi fantastici esseri della mitologia slava che, in inverno, si ritirano nei loro palazzi di ghiaccio in profondità d’acqua dolce e, sotto la coperta di un realismo sociale scottato dalla “Primavera delle Nazioni”, diventa il fiore all’occhiello dell’ “Insurrezione polacca“.(Melanie Defize)

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Messa in opera & localizzazione

Per coloro che, come gli autori di questo articolo, non fossero ancora mai stati ad Haiti, è come esserci stati dopo aver trascorso un’ora nel padiglione polacco. Infatti, nella vasta sala, la proiezione multipla non ci offre un film, ma una realtà. Non guardiamo attraverso una cinepresa, siamo sul posto, a Casale, con gli spettatori haitiani, senza distanza. Sentiamo la polvere sollevata dalle moto che passano in mezzo alla piazza dove Halka viene omaggiata all’aperto dai cantanti della Filarmonica di Varsavia, in costume. Sentiamo caldo con loro. Siamo lì, in questo altrove, con gli spettatori. Sentiamo l’odore dell’acqua e della polvere mescolati, quando l’acqua versata cerca di cancellare la polvere.

Accarezziamo con la mano la capra, quasi. All’uscita, ci diciamo che abbiamo bisogno di andare a prendere l’aereo per tornare. Ma da dove? Da Haiti, da Varsavia o da New York – e per andare dove? A Venezia? La risposta è nel titolo: 18°48’05”N 72°23’01”W. Fate uscire le bussole. La localizzazione scientifica, un’abitudine preliminare nell’opera di Malinowska, sostituisce la localizzazione nazionale. Siamo da qualche parte – in Halka / Haiti – ma non siamo piu “di” qualche posto. Siamo nella fusione. I confini sono scomparsi, lasciando solo le latitudini e le longitudini. Il mondo, insomma.

Attraverso i legami tra la Polonia e Haiti, C.T. Jasper & Malinowska interrogano in maniera più generale i legami tra le nazioni oppresse, ribelli, acquisite all’alto prezzo della loro indipendenza, così come la questione dell’incontro d’identità diverse, e del contributo che tali incontri, sociologici o artistici, danno alla comprensione, all’apertura, all’integrazione o anche alla pace nel mondo.

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2) Viaggio verso i limiti di un’identità

« Immagina il corpo umano che non appartiene
a nessuna religione in particolare ».
«Immagina il corpo umano non sentirsi superiore alla natura».
«Immagina una cultura in cui ogni creazione artistica
fornirebbe a tutti i corpi umani
delle questioni filosofiche suscettibili
di migliorare la vita nella società ».

Tutto quello che avreste voluto sempre sapere su Lussemburgo senza osare chiederlo o a causa del poco tempo preso per informarvi? Entrate visitatori, passanti e curiosi! Il Paradiso di Markiewicz è aperto, Paradiso Lussemburgo vi dice tutto: l’esposizione di Filip Markiewicz riempie fino all’orlo il Ca ‘del Duca, il palazzo dove il Granducato ha stabilito il suo padiglione in terra veneta. Un Granducato che non ha esitato a scegliere, per rappresentarlo, un figlio d’immigrati polacchi, che farà del suo “paradiso” un’opera d’”arte totale” un vero e proprioGesamtkunstwerk, della grande tradizione wagneriana, creando uno spettro esteso senza lasciare nulla d’intentato. La morfologia ipertrofica di questa creazione straordinaria si organizza intorno a una sala centrale, piccola, molto più piccola del padiglione polacco – come se si stabilisse una scala dimensionale involontaria tra il Lussemburgo e la Polonia, tra l’Europa e la regione transatlantica, tra il paradiso, così piccolo, e il resto del mondo. Come dice Filip Markiewicz stesso, “L’opera principale del Paradiso è il film Viaggio verso i limiti di un’identità. Si tratta di una sorta di road movie, interpretato da Leila Schaus e Luc Schiltz, che parte dal Lussemburgo fino ad arrivare in Polonia, paese d’origine dei miei genitori, e ritorno. Sono una specie di molteplici alter ego, che mi rappresentano, dicendo le mie parole, ma mi consentono una distanza rispetto all’autoritratto o all’auto-fiction. Possiamo anche considerarli come Adamo ed Eva persi in un nuovo paradiso”. Il film inizia a Varsavia, nel Polonia Palace Hotel, una sorta di “monumento stalinista”, di fronte al Palazzo della Cultura, “architettura stessa del fallimento di potere“, secondo Markiewicz. E il dialogo che s’instaura tra il suo “alter ego” nella stanza da bagno dell’hotel diventa un concentrato di storia dell’Europa. Più tardi (anche se le diverse sequenze del film si possono guardare secondo il tempo a disposizione dello spettatore), la sequenza che si svolge nel confine tedesco, lungo la valle della Mosella, attraverso le vigne lussemburghesi di Remich, è pregna di significato: Leila legge un estratto di Al di là del bene e del male di Nietzsche, mentre Luca è a terra in un momento quasi mitologico. L’identità, aldilà del bene e del male? L’identità europea aleggia personificata dall’artista e dalla sua opera, la massima protezione contro le identità nazionali sempre minacciose? Il film di Filip Markiewicz, allegoria versatile dai molteplici riferimenti al cinema “europeo”, ma anche a Tarantino, David Lynch, Batman… con le sue citazioni, le sue deviazioni urbane, le sue amicizie, amori e filosofie, le sue nostalgie di un paradiso sempre atteso, solleva la questione sempre attuale delle mutazioni delle identità nazionali in Europa. Il diniego dell’artificiale, il rifiuto dello stile per lo stile, caratteristiche dell’artista, e la sua firma, acquisiscono qui un certo valore. È in nome di una Necessità con la “N” maiuscola che potremmo definire nello stesso tempo terapeutica ed etica.

Filip Markiewicz riflette sulla realtà europea in un modo sia critico, sia politico e fantasmatico, ma senza illusioni sulla questione della barbarie frontale e insidiosa che la caratterizza. Lui ci parla di un mondo vissuto che non ha niente d’idilliaco, segnalandoci le sue lusinghe dubbie tanto quanto le sue irregolarità, la sua imperfezione, la sua ipocrisia, la sua violenza, la sua mancanza di equità, il suo gusto irreprensibile di combinazioni contorte. Crea mentre lo ricorda, ci crea il ricordo, l’artista viene eletto come testimone, funziona come un rivelatore, come un informatore, come un guaritore. Questo è avanzare il principio di una possibile terapia, di uno sviluppo desiderabile, di una modifica. La disposizione etica del lavoro di Filip Markiewicz come sub specie aeternitatis, si trova in questa inflessione a non lasciare mai andare la preda nell’ombra, a non lasciare lo spettatore a riposo, per questo motivo principalmente: il primo spettatore dell’opera, è qui l’artista stesso in persona, allo stesso tempo saltimbanco del mondo europeo, ricercatore e archivista di una mentalità dell’epoca e delle sue contraddizioni.

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3) Dall’identità personale a quella dell’arte

Filip Markiewicz è dunque lussemburghese, d’origine polacca, vive in Germania, immerso nell’attualità politica e mediatica. E “la fine dell’identità” per Markiewicz, non è altro che l’Unione europea, quest’unione potente e fragile, quest’alleanza delle culture di Francia e Germania, d’orientale e d’occidente, dell’inferno dei ghetti polacchi e di tutti i paradisi lussemburghesi.

Joanna Malinowska, invece, vive a New York e porta con sé la passione antropologica del suo omonimo, che non è tuttavia della sua famiglia, Bronislaw Malinoswki. Da sempre appassionata delle culture dell’altrove – si definisce addirittura “antropologa culturale” – e della musica. Il suo film presenta la musica polacca in un altrove storico e al contempo improbabile.

Ma il più interessante dei tre, in termini di lavoro identitario, è senza dubbio C.T. Jasper. Un cognome che si è scelto, un’identità costruita, un cognome, Jasper, che viene maggiormente utilizzato come nome. Non si può fare a meno di pensare subito a Jasper Johns, che ha contribuito alla famosa opera di Rauschenberg, che cancellò un disegno di Willem de Kooning3. Soprattutto perché sappiamo che nel 2013, C.T. Jasper crea il film “Erased”. Dove mescola due capolavori del cinema, Blue Velvet di David Lynch e Il tamburo di latta di Volker Schlöndorff e ne “cancella” tutti i personaggi, per il resto i film restano integralmente. La storia poi si svolge in presenza di oggetti, suoni e luci, di porte che si aprono e si chiudono, ma senza personaggi. Il personaggio è diventato lo spettatore. E ‘questo il desiderio di C.T. Jasper? Ci conduce in ogni caso, in una splendida esplorazione artistica dal potenziale narrativo di “cose” e di architetture, nella nostra assenza.

Tornando al cognome di Jasper. Se questo non è Jasper Johns, il solo patronimico Jasper conosciuto sembra quindi essere, quello di H.H. Jasper, un neurobiologo canadese deceduto nel 1999. Tuttavia, otto contee degli Stati Uniti e dodici città dell’Alabama in Arkansas, dal Tennessee al Missouri, portano il cognome di “Jasper”, mentre in informatica, disciplina cara all’artista, jasper è un compilatore/motore e un prodotto collaborativo… Collaborativo: come C.T. Jasper e Joanna Malinowska.

Tuttavia, la violenza senza nome del rifiuto del suo cognome, della sua identità, per forgiarne una nuova, fuori dalla Storia e senza storia diversa se non la sua propria, un’identità che gli permette di esistere – o di non esistere – come a Varsavia o ad Haiti, a New York o a Uulan-Bator (dove C.T. Jasper sembra risiedere quando non è a New York4), di essere lui, a suo piacimento, in una cultura globale e paesana, partner di Malinowska o UNI- umano non identificato – etichettato unicamente con la sua posizione sulla Terra, latitudine e longitudine, nient’altro. L’indipendenza e la singolarità polacca, senza limiti.

O quando il fatto di non essere più nessuna “persona” (to be nobody, in grado di cambiare il nome e l’identità) consente di creare una nuova identità e di essere così everybody.

Infine, l’estetica dei due film, rispettivamente molto diversa nei due, ma essenziale in entrambi i casi per l’apprensione dell’opera da parte degli spettatori, rivela da un lato, nel padiglione Polacco, la poesia interrogativa, a volte ai limiti del barocco di C.T. Jasper & Malinowska, e, dall’altro, le ansie profonde di Markiewicz e la paura del vuoto che potrebbe lasciare la perdita d’identità, compensata coraggiosamente da un sovraccarico di riferimenti, di oggetti, di “cose”, di straordinari disegni e animazioni molteplici del padiglione lussemburghese. I polacchi all’opera a Venezia ci lasciano ammirativi, perplessi, deliziati e sbalorditi davanti a tutti questi possibili “Somewhere in the world’s futures”.

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1 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/94989/Lheritage-polonais-dHaiti ; https://www.youtube.com/watch?v=UwCh4kbAf5g
2 Mélanie Defize, http://www.forumopera.com/actu/connaissez-vous-halka
3 https://en.wikipedia.org/wiki/Erased_de_Kooning_Drawing
4 https://tyler.temple.edu/blog/ct-jasper-aka-professor-christian-tomaszewski-collaborator-joanna-malinowska-have-been-selected

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English version

The Poles of Venice

*English translation : Charles Penwarden

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Three Polish artists, Joanna Malinowska & C.T. Jasper, and Filip Markiewicz, are in national pavilions this year: the first two, in the Polish Pavilion, in the Giardini: the third, who is of Polish origin, in the pavilion of his adopted country, Luxembourg, in the Ca’ del Duca.

In very different but parallel ways, these three artists and these two pavilions raise a question that is crucial at this moment in our history, and central to this Venice Biennale: that of national, transnational and multinational identity.

The shows in the two pavilions both feature a film, a three-channel projection. The question of identity is to the fore. Filip Markiewicz’s film is even titled: Voyage au bout d’une identité (Journey to the End of an Identity).

The similarities are multiple and, better even than many works specifically selected to address the issue, the two films evoke identity, its origins and its equally multitudinous futures.

In order to reflect the multicultural aspect of the work of these artists as well as of Rooty & Routes, this essay is published in French, the author’s language, but also in Italian and in English.

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1) Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W

When History becomes a story

To make Halka/Haiti 18°48’05”N 72°23’01”W, Joanna Malinowska & C.T. Jasper began by research into a particular identity. Like all research projects, this meant asking questions, and not necessarily supplying answers. The exploration began with a historical episode of which most Poles are unaware, involving Haiti and Napoleon. While most Poles nowadays know that they owe their existence on the map of Europe to Napoleon Bonaparte, few know how Poland “thanked” Napoleon for that formalisation of their existence.

When Haiti rose up against its French masters, Napoleon sent Polish troops to quell the revolt. A battalion set sail for this distant island, ready to defend Napoleon’s honour. But when they arrived, those that survived the yellow fever changed sides. How could they oppose the independence of Haiti when they had always been fighting for their own? It is said that, soon, only a hundred Poles were left, but they fought so well that when Haiti drafted its independent constitution, on 20 May 1805, the Poles were granted a privileged status, including Haitian nationality.1 Some even say that they were made “honorary blacks.”

What constitutes the identity of a people? How is it expressed in today’s world? How, as artists, asked Joanna Malinowska & C.T. Jasper, could they revisit this extraordinary moment in history and show the superiority of a world-vision based on the steadfast personal love of independence over a world order dictated by the powerful? How, in the age of globalisation, could they recount this unlikely alliance, a paradigm of our possible tomorrows, between Poles and Haitians?

Joanna Malinowska and C.T. Jasper opted for a classic of classics from Polish culture: its national opera, also chiming with what is a key aspect of Malinowska’s work generally: music. From Glenn Gould to Piotr Anderszewski, from John Cage to Masami Tomihisa, from Beethoven (Man in the State of Nature, 2010) to Messiaen (Three gazes out of twenty, 2008), her finest performances and videos have, for sure, been conceived around music.

Music. Halka. The first great opera by Stanislaw Moniuszko, the full version of which premiered to huge success in 1858, and soon the favourite opera of the Polish people. The libretto is often dismissed as weak, since the eponymous heroine, who became the Polish national heroine, does not perform any glorious or even patriotic action. One could even say that she is the antithesis of a national heroine, even if she encapsulates the daily pathos and injustice we all experience under the heel of the dominant classes.

Madly in love with Janusz, the father of her child, who has betrayed her and is about to marry the daughter of a wealthy landowner, the modest Halka first thinks to gain revenge by burning down the church where the wedding is taking place, then changes her mind and throws herself into the river right in front of the man she loves, quenching the torturing flame of her passion in the water. Humble in her life and extravagant in her destiny, “Halka evokes the legendary rusalki, those fantastic beings in Slav mythology, which, in winter, withdraw into their ice palace in the depths of the freshwater and, under cover of a social realism scalded by the ‘Springtime of the Peoples,’ becomes the standard-bearer of the ‘Polish insurrection’.”2

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Staging and geolocation

For those who, like the authors of this article, have yet to travel to Haiti, an hour in the Polish Pavilion makes the place vividly real. For what the multi-channel projection in this large room brings us is not so much a film as a reality. We are not looking through a camera; we are there, in Casale, with the Haitian spectators. There is no distance. We can feel the dust kicked up by the bikes motoring through the square where Halka is being sung, in the open air, by the costumed singers of the Warsaw Philharmonic. Like them, we can feel the heat. We are there, in that other place, with the spectators. We can smell the mixture of the dust and the water poured to keep it down. We can almost stroke that goat with our own hands. On the way out, we think of the plane flight back. But from where? From Haiti, Warsaw or New York? And to go where? To Venice? The answer is in the title: 18°48’05”N 72°23’01”W. Bring out the compasses. The scientific location, habitual in Malinowska’s work, replaces the national location. We are somewhere – in Halka/Haiti – but we are no longer “from” somewhere. We are in a state of fusion. Frontiers have disappeared, only latitudes and longitudes remain. In a word: the world.

Through the intermediary of these links between Poland and Haiti, C.T. Jasper & Malinowska are questioning in a more general way the links between oppressed, rebellious nations, who pay a high price for their independence, as well the encounter between different identities, and what such sociological or artistic meetings can contribute to understanding, integration and even peace in the world.

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2) Journey to the end of an identity

“Imagine the human body not belonging to any particular religion.”
“Imagine, the human body not feeling superior to nature.”
“Imagine a culture in which every artistic creation would offer all human bodies
philosophical questions capable of improving life in society.”

Everything you ever wanted to know about Luxembourg but never dared ask or never took the time to find out? Enter here, visitors, passers-by, enquiring minds! Enter the Paradise created by Filip Markiewicz. Paradiso Lussemburgo will tell you all. The exhibition by Filip Markiewicz fills to the brim the Ca’ del Duca, the palazzo where the Grand Duchy has set up its Venetian pavilion. As its representative, the Grand Duchy had no hesitation about selecting the son of Polish immigrants, who has made his “paradise” into a total artwork, an authentic Gesamtkunstwerk in the great Wagnerian tradition of expansive creative work that fires on every artistic cylinder. The hypertrophied morphology of this extraordinary opus is organised around a central room that is itself small, much smaller than the Polish Pavilion – as if an involuntary scale was being established between Luxembourg and Poland, between Europe and a transatlantic region, between this very small paradise and the great wide world. As Markiewicz himself says, “The central piece in Paradiso is the film Voyage au bout d’une identité. It’s a kind of road movie, performed by Leila Schaus and Luc Schiltz, which starts in Luxembourg and travels to Poland, my parents’ home country, then comes back. They are like alter egos, representing me and speaking my words, but allowing me to maintain a certain distance compared to a self-portrait or autofiction. They could also be viewed as Adam and Eve lost in a new paradise.” The film starts in Warsaw, in the Polonia Palace Hotel, a kind of “Stalinist monument” facing the Palace of Culture, “the very architecture of the failure of power,” as Markiewicz puts it. And the dialogue that develops between his “alter egos” in the hotel bathroom becomes a concentrate of European history. Later (and even if viewers can watch the film’s different sequences at their own rhythm), the sequence that takes place on the German border, along the Moselle, in the vineyards at Remich, Luxembourg, is richly meaningful: Leila reads an excerpt from Beyond Good and Evil by Nietzsche while Luc lies on the ground. The moment is almost mythological. Identity, beyond good and evil? The floating European identity personified both by the artist and by his work as the ultimate bulwark against national identities and their continuing, latent threat? With its quotations, its urban tours and detours, its friendships, loves and philosophies, its nostalgia for a still hoped-for paradise, Markiewicz’s film, a multifaceted allegory referencing “European” cinema but also Tarantino, David Lynch, and Batman, raises the powerfully topical question of the mutation of national identities within Europe. The rejection of the artificial, of style for style’s sake, characteristic of this artist, his signature, become programmatic here, in the name of a capital-N, superlative Necessity that can be deemed both therapeutic and ethical.

Markiewicz addresses European reality in a way that is at once critical, political and fantastical, but with no illusions as to its barbaric aspects, whether frontal or insidious. He speaks to us of a world of experience about which there is nothing idyllic, signalled at once by its dubious seduction and its irregularity, its imperfections, its hypocrisy, its violence, its lack of equity, its chronic taste for twisted deals. To create and recall all this, to create by recalling this, is to act as an artist-witness, to operate as one who reveals, denounces, and heals. It is to posit the principle of a possible therapy, a desirable improvement, an amendment. The ethical position of Markiewicz’s work, both now and sub specie aeternitatis, lies in this determination never to forsake reality for fantasy, in not letting the beholder rest, and for this reason, first of all: the work’s primary beholder, here, is the artist himself, at once a strolling player of the European world, an investigator and an archivist of a period mentality and its contradictions.

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3) From personal identity to the identity of art

Filip Markiewicz is, then, a Luxembourger of Polish origin. He lives in Germany, surrounded by political and media events. And, for Markiewicz, “the end of identity” is none other than the European Union, that powerful yet fragile union, that alliance of French and Germanic cultures, of east and west, of the hell of Polish ghettos and of all the Luxembourger paradises.

As for Joanna Malinowska, she lives in New York and is driven by the same anthropological passion as her namesake, Bronislaw Malinoswki, though he is not of the same family. Calling herself a “cultural anthropologist,” she has a lifelong passion for other cultures, and for music. Her film stages Polish music in an elsewhere that is as historically grounded as it is improbable.

But the most interesting of the three, in terms of the work on identity, is undoubtedly C.T. Jasper, who actually chose his own name, constructed his own identity. Jasper is more common as a first name. One thinks, inevitably, and immediately, of Jasper Johns, who contributed to that famous work by Rauschenberg, the erasing of a drawing by Willem de Kooning.3 And of course, in 2013 C.T. Jasper did make a film titled “Erased,” in which he merged two masterpieces of cinema, Blue Velvet by David Lynch and The Tin Drum by Volker Schlöndorff, and “erased” all the characters, leaving everything else untouched. The story thus unfolds in a world of objects, sounds and lighting, of doors opening and closing, but with no characters. The characters, in fact, have become spectators. Is that C.T. Jasper’s intention? Whatever the case, he takes us on an extraordinary artistic exploration, into the narrative potential of “things” and buildings, when we are not there.

But let us come back to the name, Jasper. Johns aside, the only other famous namesake seems to have been H. H. Jasper, a Canadian neurobiologist who died in 1999. However, you will find eight counties and twelve towns in the United States that go by the name of Jasper, in Alabama, Arkansas, Tennessee and Missouri, and in computing, a field close to this artist’s heart, jasper is a compiler/engine and a collaborative product. Hmm, collaborative – like C.T. Jasper and Joanna Malinowska.

Either way, the nameless violence of rejecting his name, his identity, in order to fashion a new one, outside History and with no history other than his own, an identity that enables him to exist – or not exist – identically in Warsaw or Haiti, New York or Ulan Bator (where C.T. Jasper would in fact appear to live when not in New York4), to be himself, as he wants, in a global, village culture, the partner of Malinowska or UN – unidentified human – labelled uniquely by his position on earth: latitude and longitude (what else?). Polish independence and singularity, all the way to nowhere (to the end of the world).

And so, being nobody, able to change name and identity, becomes a means of creating a new identity of becoming everybody.

Finally, the respective aesthetics of the two films, which are very different but in each case essential to the way we apprehend the work, give us, on one side, in the Polish Pavilion, C.T. Jasper & Malinowska’s questioning poetry sometimes verging on the Baroque, and, in the case of Markiewicz, deep anxieties and panic at the emptiness that might result from loss of identity, against which he boldly struggles with an overload of references, objects and “things,” with the extraordinary drawings and multiple animations in the Luxembourg Pavilion. These Poles of Venice inspire admiration, perplexity, enchantment and stupefaction at all these possibilities, “somewhere in the world’s futures.”

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1 http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/94989/Lheritage-polonais-dHaiti ; https://www.youtube.com/watch?v=UwCh4kbAf5g
2 Mélanie Defize, http://www.forumopera.com/actu/connaissez-vous-halka
3 https://en.wikipedia.org/wiki/Erased_de_Kooning_Drawing
4 https://tyler.temple.edu/blog/ct-jasper-aka-professor-christian-tomaszewski-collaborator-joanna-malinowska-have-been-selected

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Barbara Polla is a doctor, researcher and political figure. She has dedicated herself to art and literature since 1991. She promotes emerging artists in her Geneva gallery, Analix Forever, a venue that she turned into a space for human and cultural exchanges. She regularly collaborates with critics and curators whom she invites at her gallery or into her writing projects. She also works as independent curator. She is a Professor for creative and critical writing at HEAD (Higher School for Art and Design) in Geneva. In her assays, she investigates gender issues and during the last two years has intensively worked on art and prison. Freedom and creativity are mong her essential values. Among her recent publications: L’Ennemi Public, Ed La Muette, co-directed with Paul Ardenne & Magda Danysz, 2013; Tout à fait Femme, Odile Jacob, 2012; Tout à fait Homme, Odile Jacob, 2014; Architecture Emotionnelle, Matière à penser, Ed La Muette, co-directed with Paul Ardenne, 2011; Victoire, L’Âge d’Homme, 2009; A toi bien sûr, L’âge d’Homme, 2008. She is a regular contributor to the magazines Crash, Drome, Juliet and Roots & Routes. Since 2011, she works as “nomadic gallerist” in Paris, where she also created the venue VideoForever, a monthly video projection by themes.

Paul Ardenne is a critic and art historian. He teaches at the Université d’Amiens (France). He is the curator of the Luxembourg Pavilion.